Vrai, faux, ignoré, plagiat.
Tout ce qui sera présenté à l’occasion de l’exposition " AKZHENTY " est
vrai, faux et aussi du plagiat.
Par exemple en ce qui concerne les pliages, tous sont vrais à plusieurs niveaux :
a) Les pliages que je ramasse et que je collectionne.
b) Ceux que je fabrique moi-même.
Or tous ces pliages peuvent être faux.
Ceux que je fabrique, que je les mélange ou non aux pliages anonymes,
ramassés et collectionnés. Ceux-ci étant donc de vrais pliages d’une
vraie collection constituée de pliages faits par des auteurs inconnus, anonymes, ces pliages ne portant pas d’autographes et jusqu’ici ignorés par le champ de l’art, leurs auteurs inconnus n’étant donc pas reconnus comme artistes. Donc ces pliages ce sont de faux objets d’art.
Or il a été dit que " tout le monde est artiste " ou quelque chose comme : " tout est art ".
Je suis reconnu comme artiste, toutefois je ne peux pas établir à quel niveau hiérarchique je suis reconnu comme artiste dans le temps actuel.
Or dans cette hiérarchie, il semble qu’il soit désormais acquis, ce
sont des bruits qui courent, que les formules " tout est art " et " tout le monde est artiste " sont bien présentes et inscrites dans la page de référence incontournable de ce qui pourrait être dit comme étant l’Art Contemporain.
Les critères de base qui pourraient servir pour établir une hiérarchie seraient les suivants : Qui ? Où ? Quand ? Comment ? Pourquoi ? très
fragiles ou consolidés selon l’économie qui établit l’autorité que les
manipule.
Dans cette reconnaissance nous nous trouvons devant un dilemme bien
troublant, qui est le suivant : comment établir une équation à partir de
cette fraction ? " Tout le Monde " et " quelques-uns " ?
Qui est qui ?
Après le temps actuel dans lequel est installé " L’Art Contemporain ",
nous allons aborder le temps global ; historique supra historique et là,
en ce lieu, l’archéologie intervient, elle se déplace ou compartimente
le temps global de la culture, de la civilisation, de l’histoire.
Le temps présent faisant partie du temps global, il est évident que
quand je ramasse des pliages, je les prends aussi comme indices et je
les classifie comme tels ( bien que cela n’ait commencé qu’en 1971 )
comme le fait l’archéologue ou bien l’entomologiste : lorsque j'en ramasse
un, j’inscris à même le pliage le lieu, la date et l’heure.
Retour :
Les pliages que je fais, je les mélange parfois aux pliages "
archéologiques ", ce mélange prétend créer un objet global composite,
fait de ces objets anonymes, mais passés dans la catégorie " tout est art "
avec des objets fabriqués par moi qui ai un statut d’artiste. Quel que soit le degré dans lequel je me trouve défini dans la hiérarchie
universelle des artistes, je suis de toute façon artiste, puisque je
souscris au fait " que tout le monde est artiste ". Ceci s’inscrit dans
l’incontournable chronique de " l’art vivant ". Ici la hiérarchie devient
horizontale, caractéristique qui marquera ce siècle.
Or je suis artiste et je fais de vrais objets d’art : tout objet que je
touche devient objet d’art. Tout pliage fait par moi ou non est objet
d’art.
Ceci dit, je peux m’arrêter un instant pour constater qu’il n’est pas
nécessaire d'avoir l’assentiment universel pour que l’Art poursuive sa
progression dans l’histoire universelle des civilisations.
Or le faux ici est aussi un flagrant plagiat. Éloigné du pliage originel,
je ne suis plus original.
Je frôle, je touche ici la question du ready-made bien qu’il s’agisse
d’objets manufacturés. Dans le monde, il existe bien sûr un grand nombre
de machine plieuses. Le processus, la démarche est calqué sur le
ready-made.
Je tiens à me démarquer des artisanats de la pratique de l'Origami et de sa discipline proche de la mystique. J’ai dit proche.
Au point où je me trouve, je peux poser une question irrévérencieuse, voire
même inopportune : qui est apparu le premier, le pliage ou le papier ?
Je fais une halte pour citer les pliages qui m’intéressent. Ce sont en
premier lieu les avions, puis les bateaux, ensuite les salières puis
enfin les cocottes. Parfois je tombe en complaisance et je ramasse un
oiseau, un Shadock, une grenouille, un accordéon.
Ce sont des pliages qui se font d’une façon spontanée, automatique,
distraitement.
Ignoré & ignoré
Inconnu & inconnu
La grande majorité des pliages est faite avec du papier, des papiers.
Mais il m’arrive d'en réaliser certains à l’aide de fines feuilles de
cuivre. Dans ma collection, j’ai un pliage d’avion fait avec de la
feuille de plomb et qui me fut offert par Thierry Agullo.
Les pliages sont souvent faits avec des papiers imprimés ou ayant des
textes, dessins , gribouillis. Pour moi ceux-là sont de toute évidence
les plus intéressants, puisqu’ils m’apparaissent comme des signes
poussière de Babel. C’est bien plus qu’une fragmentation de textes pour
être une sorte de kaléidoscope, salle de miroirs déformants.
Cette activité est inépuisable car je peux, tant que ma vie dure et mon
état de santé le permettra, déambuler par le monde à la recherche de
pliages. Aussi tant que j’ai du papier, je peux en faire.
Mon “atelier”, mon LABORATOIRE est dans la rue. Les rues du monde:
Villes, cités, villages, voies....
Ramasser ces plumes d’ange et les imiter. Comme l’homme qu’observe les
oiseaux et veut lui aussi voler.
Pliages et petit Poucet
Ces pliages que je ramasse lors de mes promenades peuvent procéder de
quelque chose comme des traces, des indices laissés par un Petit Poucet
Traces d'anges, plumes d’anges.
Et marquage d’un chemin de petit Poucet qui perdra la trace du retour.
Les autres artistes qui participent à cette exposition intègrent cette
problématique à un autre niveau.
Le lien est tout simplement celui-ci : " Cela, moi aussi je pourrais lefaire ". Cette fameuse phrase est le contrepoint de tout ce qui s’est ditdans les commentaires qui construisent l’art contemporain. Ce leitmotivdonne sens au " tout est art & tout le monde est artiste ", car ils’agit d’une force de résistance et non deréflexion. Serait-ce une forme d’ignorance ontologique ?Cette exposition est de toute évidence ce qui se dit comme étantl’exemple flagrant de ce : " que tout le monde peut faire " ou « ce quemême moi je pourrais faire « D’ailleurs cela est évident puisque pour le moins 1373 pièces sontfaites par d’illustres inconnus & encore quelques centaines faites pardes assistants.Sans compter la question du vrai et du faux comme celle de tout le mondeest artiste ou tous peuvent faire de la poésie (Lautréamont ).Bien sûr qu’il serait plus juste de dire : Tout le monde pourrait être artiste ettout le monde pourrait faire de la poésie.Si Albert Aconit décide de faire des œuvres ou en s’appropriant desobjets et en les disposant comme étant de l’art et que ce même AlbertAconit donne un nom d’auteur à chaque type d’objets par lui réalisés oupar lui récupérés, cet Albert déploie et crée des noms d’artistes pourchaque évènement auquel il participe. Supposons que ce nombre xd’artistes produits par Albert soit = à 39. 39 auteurs pour Albert.Qu’il fasse école et 1000 artistes se déployant en 39 artistes ou auteurs,cela ferait pour 1000, 39 000…Ceci est une équation de travail.Or il peut arriver que parmi ces 1000 artistes, il s'en trouve un pouren faire 42 et un autre qui décide d’aller jusqu’à 47, ceci donnerait 39 011artistes, et ces opérations peuvent se poursuivre par des plus ou desmoins, des plus et des moins.En attendant qu’avec le progrès et grâce à l’éducation obligatoire ilest vraisemblable que dans deux ou trois générations, tout habitant denotre planète soit conscient d’être artiste et de suivre la démarchenaturelle de se produire en tant que multitude, et nous assisterons à unfait extraordinaire : une surpopulation d’artistes bien supérieure à lapopulation recensée. Exemple 5 000 000 000 à multiplier par + / - 39 = Y x 5 000 000 000.Ceci posera de sérieux problèmes en Economie.Il ne s’agit pas de pseudonymes ni tant soit peu d’hétéronymes, mais de nomsdonnés à chaque corpus d’œuvres.Il s’agit ici - comme il est évident - de l’effet paroxystique de l’art contemporain poussé jusqu’au bout.Vrai, faux, plagiat, copie, vrac, rien, rien, rien ! ? Je le dis troisfois, rien ne pourra plus arrêter l’irrésistible poussée de l’artcontemporain dans cette délicieuse planète qui ne cesse d’évoluergrâce à une classe d’individus éclairés jusqu’à aboutir à unepopulation d’artistes qui dépassera la population recensée et lapopulation affamée.L’économie face à elle-même.Qui collectionne qui ?C’est excellent.L. Darocha 12/08/79